Armando Lulaj
Armando Lulaj est un artiste visuel, écrivain et cinéaste. Sa recherche est orientée vers l’accentuation de la frontière entre le pouvoir économique, la démocratie fictive et la disparité sociale dans un contexte global. En 2003, il a cofondé le DebatikCentre d’Art Contemporain à Tirana. Ses œuvres ont été présentées à la Biennale de Prague (2003, 2007), à la 6e Biennale de Berlin (2010), à la 52e Biennale de Venise (2007), au 63e Festival International du Film de Berlin (2013), au Théâtre National de Tirana (2013), et il a représenté l’Albanie à la 56e Biennale de Venise (2015). Des expositions individuelles récentes ont été présentées à la Zone d’Art Contemporain de l’Académie des Arts de Szczecin (2024) et au Centre d’Art Contemporain ZETA à Tirana (2024). Le livre “Broken Narrative: The Politics of Contemporary Art in Albania”, écrit par Lulaj et Marco Mazzi, a été publié en 2022 par punctum books.
La “Trilogie Albanaise” (2011-2015) se concentre sur une période historique et politique qui a été extrêmement importante pour construire non seulement l’identité albanaise mais aussi l’identité internationale. Lulaj recrée des archives informelles basées sur ses propres souvenirs et des histoires orales concernant la narration historique albanaise. Le projet représente de nombreuses années de recherche sur la période de la Guerre Froide en Albanie, et en particulier sur les thèmes de la mémoire collective et de l’expérience historique, rassemblés dans une trilogie cinématographique dans laquelle trois fétiches mythiques symbolisent la mer, l’air et la terre. Le catalogue “Trilogie Albanaise”, édité par Marco Scotini, a été publié en 2015 par Sternberg Press pour accompagner le projet de Lulaj pour la 56e Biennale de Venise.
Œuvres de Armando Lulaj
Breaking Stones
2017, vidéo numérique
11 minutes
Nuit. Zone suburbane de la ville de Tirana. Un homme tenant une grosse pierre dans ses mains apparaît dans la rue sombre. Alors qu’il marche, il frappe à plusieurs reprises la pierre contre le sol jusqu’à ce que les morceaux deviennent suffisamment petits pour être facilement ramassés par d’autres passants et probablement utilisés par eux lors d’une prochaine manifestation. Il disparaît dans l’obscurité. Dans une autre rue, peut-être qu’un autre homme semble répéter la même action.
Recapitulation
2015, vidéo numérique
10 minutes
Partie de “Trilogie albanaise : Une série de stratagèmes trompeurs”.
Le 23 décembre 1957, à 11h10, un avion Lockheed T-33 Shooting Star américain piloté par le major Howard J. Curran a quitté Châteauroux, France, en direction de Naples, Italie. Au-dessus de Turin, la radio de l’avion a échoué et après avoir rencontré de mauvaises conditions météorologiques avec des vents forts, l’avion a dévié de sa trajectoire pour se retrouver, par erreur, dans l’espace aérien souverain de la République populaire d’Albanie. À 13h28, l’intrus a été intercepté par le Commandement de l’Armée de l’Air albanaise, qui a immédiatement ordonné à deux chasseurs MiG-15 de décoller pour l’identifier. À 15h50, les chasseurs ont signalé qu’ils avaient repéré l’intrus dans la zone autour de l’aéroport de Rinas, volant à 500-650 km/h à une altitude de 150-200 m. Des contre-mesures rapides ont été prises. L’avion a été contraint d’atterrir et, pour l’empêcher de redécoller, l’aéroport a été verrouillé.
NEVER
2012, vidéo numérique
22 minutes
Partie de “Trilogie albanaise : Une série de stratagèmes trompeurs”.
En 1968, par ordre du Parti du Travail, l’armée, aidée par la jeunesse volontaire, entreprend l’un des plus grands travaux volontaires de l’ère communiste en Albanie : sur le flanc d’une chaîne de montagnes près de la ville albanaise de Berat, le dictateur albanais Enver Hoxha fait graver son nom dans une inscription monumentale. 44 ans plus tard, un groupe de villageois s’efforce de gravir la montagne et de modifier les lettres en écrivant un nouveau mot, faisant référence à la dictature passée et au gouvernement actuel. ENVER devient NEVER dans un processus laborieux de « (dé-)nommer » le passé récent.
It Wears as it Grows
2011, vidéo numérique
18 minutes
Partie de “Trilogie albanaise : Une série de stratagèmes trompeurs”.
Le 25 mai 1959, au plus fort de la Guerre froide, Nikita Khrouchtchev a visité l’Albanie pour discuter des plans de l’Union soviétique pour armer l’État d’Enver Hoxha avec des sous-marins et des navires de guerre, positionnant des missiles à longue et moyenne portée le long de la côte albanaise, afin de contrer les bases de missiles américaines installées en Italie dans le but de contrôler la Méditerranée. En 1963, après la rupture des relations avec l’URSS, la marine albanaise, par peur paranoïaque des attaques ennemies, a repéré un objet qui apparaissait et disparaissait à la surface de la mer au large de la côte de Patok. Pensant qu’il s’agissait d’un sous-marin, ils l’ont tiré. L’objet s’est avéré être un cachalot (Physeter macrocephalus), le sperm whale méditerranéen. Après avoir été récupéré, les restes de la baleine ont été exposés au Muséum d’Histoire Naturelle de Tirana.